que deviennent les créanciers lors d'une cession entreprise

Lorsqu’une entreprise change de mains, il est normal de se demander ce qui arrive aux créanciers en cours, et comment ces derniers peuvent protéger leurs intérêts. Dans cet article, nous vous expliquons les différentes étapes que suivent les créanciers lors d’une cession d’entreprise, ainsi que les mécanismes de protection qui leur sont offerts.

La notification des créanciers : une obligation légale

Dès qu’une vente d’entreprise ou de fonds de commerce a été conclue, l’acheteur doit informer chaque créancier de la situation. Cette démarche, appelée notification des créanciers, est encadrée par la loi et vise à donner la possibilité aux créanciers de s’opposer à la transaction si celle-ci porte atteinte à leurs droits.

Forme et contenu de la notification

La forme de la notification des créanciers varie selon le type de créance concernée. Pour les créances bénéficiant d’un privilège ou d’une sûreté, la notification doit être effectuée par acte extrajudiciaire (acte d’huissier), tandis que pour les autres créances, elle peut être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception.

Quelle que soit sa forme, la notification doit contenir certaines informations essentielles, telles que :

  • Les coordonnées de l’acheteur et du vendeur
  • La date de la vente
  • Le prix de cession
  • Les modalités de paiement du prix de cession
  • Les éventuelles garanties consenties par l’acheteur
  • Les conditions suspensives de la vente, le cas échéant
  • Un rappel des délais et modalités d’opposition des créanciers

Délai pour notifier les créanciers

La notification doit être effectuée dans un délai de quinze jours suivant la date de la publication de l’avis de la cession au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc). Ce délai est impératif, et le non-respect de cette obligation peut entraîner des sanctions pour l’acheteur.

Procédure d’opposition des créanciers

Une fois notifiés de la cession, les créanciers disposent d’un délai de dix jours pour s’opposer à celle-ci. La procédure d’opposition se fait devant le tribunal de commerce compétent, et vise à protéger les intérêts des créanciers en empêchant l’acheteur de disposer librement des fonds issus de la cession.

Étapes de la procédure d’opposition

  1. Déclaration d’opposition : Le créancier doit déclarer son opposition auprès du greffe du tribunal de commerce compétent, par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec accusé de réception. Sa déclaration doit mentionner le montant et la cause de sa créance, ainsi que les coordonnées du débiteur cédant.
  2. Consignation des fonds : Suite à l’opposition, les fonds issus de la cession sont consignés entre les mains d’un séquestre (généralement un notaire), afin d’être répartis ultérieurement entre les créanciers opposants selon les modalités prévues par la loi.
  3. Vérification des créances : Les créanciers sont tenus de fournir des justificatifs prouvant l’existence et le montant de leur créance. L’acheteur peut contester ces créances devant le tribunal de commerce, qui statuera sur leur validité.
  4. Répartition des fonds : Une fois les créances vérifiées et validées, les fonds consignés sont répartis entre les créanciers opposants au prorata de leurs créances respectives. Les éventuels surplus sont restitués à l’acheteur.

Effets de l’opposition sur la vente

L’opposition des créanciers n’a pas pour effet d’annuler la vente, mais seulement de retarder le paiement du prix de cession. En effet, tant que la procédure d’opposition est en cours, l’acheteur ne peut pas disposer librement des fonds issus de la cession. Néanmoins, si la vente est soumise à des conditions suspensives, l’opposition peut entraîner la non-réalisation de ces conditions et, par conséquent, l’annulation de la vente.

Que faire en cas d’absence d’opposition ?

Si aucun créancier ne s’est opposé à la cession dans le délai légal, les fonds sont considérés comme librement disponibles pour l’acheteur. Ce dernier doit néanmoins rester vigilant, car il demeure solidairement responsable avec le vendeur du paiement des créances nées avant la cession (à l’exception des créances salariales).

Mise en place de garanties pour se protéger

Afin de se prémunir contre les éventuelles actions en recouvrement des créanciers, l’acheteur a tout intérêt à mettre en place des garanties, telles que :

  • Une clause de garantie de passif, qui permettra à l’acheteur de se retourner contre le vendeur en cas de mise en jeu de sa responsabilité solidaire
  • Une rétention du prix de vente, permettant à l’acheteur de conserver une partie du prix de cession pendant un certain temps et de garantir ainsi le paiement des créances antérieures
  • Une garantie bancaire ou une caution personnelle accordée par le vendeur, afin de couvrir les éventuels impayés

En conclusion, bien que la cession d’entreprise génère des incertitudes quant au sort des créanciers, la loi met à leur disposition des mécanismes de protection tels que la notification et la procédure d’opposition. De cette manière, les créanciers peuvent préserver leurs droits et s’assurer que la transaction n’affectera pas leur capacité à recouvrer leurs créances.